BATTANT : LA TÊTE DE PONT DE BESANÇON
L’historique pont de la ville a, au fil des siècles, singulièrement changé de gueule au risque d’y perdre pas mal de son âme. Mais il offre toujours une vue qu’on peut classer dans le top 5 des plus belles que propose Besac.

Signé Yvon, LE spécialiste français de la carte postale depuis 1919.© Yvon.
Le pont Battant a été, jusqu’à la fin du XVIIe siècle et la construction de la passerelle de Bregille, le seul de Besançon (et de tous les environs) à permettre de traverser le Doubs à pied, à cheval… Le premier pont a, vraisemblablement, été construit par les Gaulois, et tout en bois. De celui-là, le cours du Doubs (et celui du temps) n’ont rien laissé.
En revanche, aujourd’hui, quand beaucoup posent leur fesses pour un tacos ou une 8°6®, à l’ombre du pont d’aujourd’hui, c’est sans, a priori, le savoir sur des pierres installées là depuis le IIe siècle… Vestiges de la base d’une pile d’une des sept arches du pont construit par les Romains. Qui, pas si fous que ça ,avait fait dans le robuste en piquetant de métal une roche calcaire dénichée dans ce qui s’appelle aujourd’hui la Haute-Saône. Parce que si plusieurs de ses arches ont disparu, notamment avec la construction des quais entre les XVIIIe et XIXe siècles, s’il a été moult fois consolidé dès le XVe siècle, ce pont romain a résisté à tout : aux invasions barbares comme à cette rivière pas si douce que son nom pourrait le laisser penser qui charriait massives billes de bois et autres blocs de glace. Et qui souvent avait tendance à se laisser franchement aller, comme pendant la fameuse crue de 1910.
Un pont sous les bombes
C’est la Seconde Guerre mondiale qui est fatale au vieux pont romain : dynamité une première fois en juin 1940 par les forces françaises pour ralentir des nazis qui refont la même, en septembre 1944, soufflant au passage les vitraux de la Madeleine et les fenêtres d’une bonne partie de Battant. Les arches (qui avaient un peu trop tendance à retenir tout ce que Doubs trimballait dans ses eaux) sont oubliées lors de la reconstruction de 1953, avec un pont d’un seul jet, en béton précontraint, technique plutôt révolutionnaire pour l’époque. L’inauguration est symbolique de Besac, une ville qui a, depuis longtemps, le cœur à gauche, mais qui doit (on vérifiera l’info un jour, promis !) abriter le plus grand nombre d’églises et de chapelles rapport à sa population : le ruban est coupé par le maire socialiste Jean Minjoz mais le pont est béni par le curé de la Madeleine. Le pont Battant que tu découvres aujourd’hui a été inauguré en 2013 et est, lui, entièrement métallique. Sa largeur est passée à 24 mètres pour permettre aux nouvelles rames de tram (pour la petite histoire, un tramway y circulait déjà en 1897) de négocier des virages un peu serrés. Ses grilles ont, comme pour beaucoup d’autres pont dans le monde, cédé (au sens figuré… pour l’instant) à la mode des « cadenas d’amour ». Pas sûr que les poissons apprécient plus que ça les clés jetées ensuite dans le Doubs… Pas sûr, non plus, que l’instagrammable statue de Jouffroy d’Abbans ne voit ça d’un très bon œil. Et si, au Moyen Âge, des boutiques occupaient chacun des côtés du pont, depuis quelque temps, les vendeurs de casquettes de base-ball et autres lunettes de soleil tout comme la pétillante Marine et ses fleurs du jardin ne semblent, désormais, plus franchement les bienvenus sur ce pont qui, s’il a donc une longue histoire, manque aujourd’hui singulièrement d’âme. Reste la vue sur les quais…
F.P.C.

Le marquis, songeur devant une ville déserte… © Besançon Ville d’Art et d’Histoire.
✪ Entre la Boucle et le quartier Battant. Accès : tram, lignes 1 et 2, arrêt Battant ou bus 8, arrêt Battant.






